
© Inria – Margaux Lhuissier
(Au milieu de la mer Égée, le Maître, calme et posé, est assis à bord d’une petite barque. Son jeune Disciple, impatient et énergique, observe sa ligne de pêche avec frustration.)
DISCIPLE (agacé, regard fixé sur sa ligne)
Cette mer semble décidée à dormir autant que mon hameçon aujourd’hui. Tout paraît si calme, immobile !
MAÎTRE (amusé)
Immobile, dis-tu ?
DISCIPLE
Aussi immobile que mon estomac est affamé ! Voyez-vous-même : aucune tempête, aucun courant, à peine quelques vaguelettes pour déranger la surface.
MAÎTRE (en regardant l’horizon, pensif)
Ah, mon cher disciple, que la jeunesse aime les évidences faciles ! La surface ne raconte qu’une infime partie des tumultes de notre belle Égée.
DISCIPLE (sceptique)
Ne me dites pas que sous cette eau calme s’agitent de mystérieux courants. Je n’en vois nulle trace !
MAÎTRE (avec un geste ample montrant la mer)
Regarde mieux. Cette légère brise qui gonfle doucement notre voile, elle souffle aussi sur la mer. Imagine-la : elle pousse la couche d’eau supérieure, qui à son tour entraîne lentement celle du dessous, et ainsi de suite jusqu’à épuiser toute sa force en profondeur. Une danse invisible sous nos pieds !
DISCIPLE (étonné, fixant l’eau avec suspicion)
Ainsi, toute la mer suivrait donc la direction du vent ?
MAÎTRE (traçant lentement une spirale imaginaire vers le bas)
Prudence encore ! Tu oublies que la Terre tourne sous nos pieds. Nous tournons avec elle, sans rien ressentir. Mais l’eau, elle, est libre : chaque couche entraînée par celle du dessus dévie légèrement. Et voilà que, plus tu plonges, plus les courants forment une magnifique spirale, allant même jusqu’à inverser leur direction tout en bas, loin de nos yeux.
DISCIPLE (perplexe)
Un tel dessin sous l’eau ? J’ai vu des rivières, Maître : rien que des tourbillons sans logique ni raison !
MAÎTRE (riant doucement)
Précisément, ta rivière est trop petite, trop turbulente ! Ici, dans notre vaste mer, ces spirales discrètes ne s’observent qu’à grande échelle. Bien sûr, des tourbillons plus petits apparaissent partout, mais ce sont justement eux qui dispersent dans l’eau la vie elle-même.
DISCIPLE (toujours perplexe, fronçant les sourcils)
La vie ? Vous prétendez donc qu’un courant discret pourrait changer quelque chose à mon estomac vide ?
MAÎTRE (bienveillant, pointant l’eau)
Plus que tu ne le crois mon jeune ami ! Ces courants emportent les sédiments fertiles, les distribuent sous l’eau. Les algues en profitent pour pousser et prospérer. Puis viennent les minuscules crevettes, qui mangent ces algues, suivies des petits poissons affamés, et enfin les dorades que tu rêves de déguster depuis ce matin.
DISCIPLE (récapitulant maladroitement)
Donc, si j’ai bien compris, pour manger une dorade ce soir, je devrais espérer que le vent pousse des vagues invisibles qui nourrissent des algues, dévorées par des crevettes, elles-mêmes mangées par des poissons… Un véritable complot sous-marin contre ma faim ?
MAÎTRE (riant franchement cette fois-ci)
Voilà une intéressante théorie ! Ce serait un long chemin pour obtenir ta dorade.
DISCIPLE (réfléchissant à haute voix, comiquement)
Alors, si je souffle très fort sur l’eau toute la journée, je pourrais accélérer tout cela ?
MAÎTRE (amusé)
Oh, si tu pouvais souffler sur toute la mer Égée jour et nuit durant des semaines entières, et patienter quelques mois, peut-être bien que tu rentrerais avec ta dorade la prochaine fois…
DISCIPLE (soupirant avec théâtralité)
Cela me semble bien des efforts inutiles ! D’ailleurs, Maître, au lieu de m’endormir avec vos belles histoires sous-marines, ne pourriez-vous pas plutôt m’aider à pêcher ?
(Le Maître, riant toujours, s’approche doucement du disciple et prend une ligne lui aussi.)
MAÎTRE (avec complicité)
Puisque ma sagesse ne nourrit pas ton estomac, voyons ce que mes talents de pêcheur peuvent faire pour toi, jeune impatient !

Mattéo Nex
Équipe de recherche : ODYSSEY
Sujet de thèse : Mon sujet de thèse est le développement de modèles stochastiques pour modéliser la couche de mélange océanique de surface et le couplage avec des modèles de biogéochimie marine. Les outils stochastiques permettent de représenter les processus sous-mailles non résolus en apportant une variabilité intrinsèque due aux termes non déterministes. Ces outils permettent de mieux quantifier les incertitudes liées à la variabilité de ces systèmes dynamiques complexes, comme les modèles couplés physique-biogéochimie.
«Méthodes stochastiques pour la modélisation et la quantification d’incertitudes dans des modèles d’océan couplés physique-biogéochimie»
À côté de ma thèse je suis musicien dans plusieurs groupes, je compose de la musique pour des petits films, je suis passionné de son et d’enregistrement. Je passe également beaucoup de temps à bricoler, je fais du volleyball en compétition dans une équipe de Nationale 3, j’aime les jeux vidéo, la philosophie et les chats.