La plupart des personnes souffrant de Troubles du Spectre de l’Autisme (TSA) font état d’un intérêt personnel et spécifique sur un objet singulier tel qu’un jouet, un domaine de connaissances (la route, les avions…), les dessins animés, la musique… pour n’en nommer que quelques uns. L’affinity therapy repose très précisément sur un tel intérêt particulier à partir duquel un lien soutenu s’instaure entre le monde de la personne autiste et son entourage. Ces affinités, naguère fustigées comme des « obsessions » ou des « lubies passagères », tendent maintenant à devenir le support principal du traitement en permettant une ouverture au monde, à la socialisation et aux apprentissages.
L’Affinity Therapy se développe en 2014 après la publication dans le New-York Times d’un article qui résume l’ouvrage que Ron Suskind vient de publier : Life, Animated (2014). En 2016, il y en aura même un film. Dans son écrit, Ron Suskind, un célèbre journaliste politique Américain qui a reçu le prix Pulitzer, raconte l’histoire de son jeune fils Owen chez qui un sévère trouble de l’autisme fut diagnostiqué dès l’âge de 3 ans. Owen a rapidement perdu la capacité de parler. Il a cessé d’interagir avec l’autre et s’est replié sur son monde intérieur. Le seul intérêt d’Owen résidait dans le visionnage de films Disney et il pouvait passer de nombreuses heures et voir et à revoir ces dessins animés. C’est ainsi que Ron Suskind, contre l’avis des spécialistes, a choisi de suivre et de soutenir la passion de son fils.
Après plusieurs années à tenir cette position, la thérapie centrée sur l’intérêt spécifique d’Owen a permis au jeune garçon de trouver comment se séparer de son propre monde intérieur pour davantage se connecter aux autres. Aujourd’hui, Owen travaille dans un cinéma et s’est lancé dans l’écriture de son propre scénario de dessin animé.
Étonnamment, l’histoire d’Owen n’est pas unique. Le récent livre « Affinity therapy »: nouvelles recherches sur l’autisme publié par Myriam Chérel en 2015 recense et analyse de nombreux cas de personnes avec autisme pour qui l’usage de ces passions autistiques a permis au traitement de faire des progrès significatifs. Aujourd’hui, l’affinity therapy est considérée comme un nouvel outil thérapeutique qui pourrait révolutionner l’accompagnement des personnes autistes dans les années à venir. En effet, la plupart des personnes avec TSA témoigne de l’appui fondamental que leur affinité est pour eux-mêmes et pour leur famille.
Loin des différentes thérapies comportementales ou cognitives qui utilisent les intérêts spécifiques comme un « renforçateur positif de comportement » ou comme un « vecteur de développement des compétences sociales », la pratique de l’affinity therapy conduit à l’observation de changements majeurs dans le quotidien de la personne autiste lorsque ses passions sont considérées comme une clef qui ouvre au lien social, aux compréhension et expression langagières et aux apprentissages. Cette « clef » est toujours unique, propre à chacune des personnes avec TSA. L’affinité élective est toujours spécifique à un autistic mind singulier.
L’Affinity Therapy implique ici l’invention d’un traitement nouveau pour chacun, que ce soit avec des dessins animés pour l’un, des carillons pour un autre, des trains pour un troisième, parfois un animal, etc. L’Affinity Therapy n’est pas un aménagement de parcours déjà balisé, c’est la création d’un parcours sur mesure, au cas par cas, à partir de la passion toujours singulière des individus autistes.
De nombreuses institutions accueillant des sujets autistes, intègrent l’objet dit autistique, ou « affinité » dans leurs pratiques quotidiennes. Qu’elle soit discrète ou manifeste, elle n’est pas considérée comme un obstacle, mais plutôt comme un objet privilégié, une affinité élective de l’autistic mind. Cette pratique s’inspire de ces savoir-faire, où le point de visée est de se faire partenaire des personnes avec autisme. « Se faire partenaire » est le principe qui oriente toutes ces pratiques et qui incite par là même à respecter l’altérité du sujet autiste.