Le 6 décembre à Rennes, en partenariat avec le festival des Transmusicales, se tient le rendez-vous de l’écosystème numérique régional. Comme l’an passé, la Digital Tech Conference s’intéresse à l’innovation vertueuse, mais cette fois-ci en portant son regard sur les solutions concrètes pour la mettre en œuvre. L’événement est co-produit par Inria, Destination Rennes et Le Poool, structure French Tech d’accompagnement de startups à Rennes et Saint-Malo.
Chercheurs, ingénieurs, étudiants, créateurs d’entreprises, investisseurs… La Digital Tech Conference se veut un lieu de brassage où les acteurs du numérique viennent échanger des points de vue, présenter des technologies, détecter des tendances, repérer des talents, chercher des solutions, amorcer des collaborations, faire germer des projets. On y attend un millier de participants, une cinquantaine d’orateurs et autant d’exposants dont six startups Inria : Dilepix, Malizen, Skyld, Anax, Sonaide et Imatag.
Comme l’édition précédente, le millésime 2022 est placé sous le signe de l’innovation vertueuse.
L’année dernière, nous avions ouvert le sujet avec des interventions parfois presque philosophiques. Cette fois-ci, nous nous intéressons moins aux concepts et plus aux solutions concrètes,
résume Emmanuelle Garnaud-Gamache, membre du comité de programme et directrice marketing/communication/partenariats de l’IRT b<>com.
Pour illustrer le propos, la conférence met en lumière quelques-unes des réussites locales qui s’inscrivent dans cette veine. Exemple: Les Coursiers Rennais. À la force du mollet, ces cyclistes livrent des repas concoctés par une variété de restaurants, offrant au passage une alternative aux grandes plateformes numériques qui se nourrissent sur un modèle économique moins équitable. Ou encore : Comme Un Établi. Niché dans un grand hangar au nord de Rennes, cet atelier d’artisanat partagé met ses machines-outils à disposition des professionnels et des particuliers dans un mode de fonctionnement à mi-chemin entre la coopérative et le fablab.
Metavers
Mais les visiteurs pourront aussi assister à des débats plus prospectifs et pas forcément toujours consensuels. Au programme en particulier : le metavers. “Comment parler d’innovation vertueuse dans ce domaine ? C’est une vraie question !, constate Emmanuelle Garnaud-Gamache. Ces mondes virtuels sont-ils écologiquement soutenables ? Est-ce vraiment raisonnable de penser que l’on va avoir la capacité à les entretenir ? Cela soulève de grands questionnements, rarement évoqués. Ou alors rapidement, à la fin des débats, au détour d’une question dans le public. Nous allons donc nous intéresser à ces metavers non pas uniquement sous l’angle des purs bénéfices comme on nous les présente dans la publicité, mais aussi sous celui de leur empreinte environnementale et sociétale.”
Quatre personnes viendront en débattre. “Nous souhaitons faire entendre des points de vue très divers, explique Christine Morin, déléguée scientifique au centre Inria de l’Université de Rennes. Nous aurons Ferran Argelaguet qui nous donnera son opinion en tant que chercheur Inria. Il est membre de l’équipe Hybrid et travaille sur des technologies liées au metavers. Nous aurons aussi la vision créative d’un expert des mondes virtuels avec Stéphane Maguet et celle des industriels avec Ludovic Noblet qui pilote la feuille de route technologique à l’IRT b<>com. Et puis nous voulons également donner la parole à la nouvelle génération en accueillant un étudiant. Il s’agit de Pol Bachelin, de l’Epitech.” À noter au passage que le sujet est abordé dans le rapport de mission exploratoire sur les risques et opportunités du métavers remis fin octobre au gouvernement. Un des trois auteurs en est Rémi Ronfard, chercheur au centre Inria de l’université de Grenoble Alpes.
Un manifeste
“Une des grandes singularités de la Digital Tech tient dans le fait qu’il y a énormément d’acteurs autour de la table au comité de programme : des scientifiques, des entrepreneurs, des acteurs du territoire, des acteurs culturels… Donc, c’est un événement co-construit où s’exprime une diversité de points de vue et où chacun arrive avec des enjeux différents en termes d’innovation vertueuse,” observe Marion Trommenschlager, responsable communication du Poool.
Pour cimenter une démarche commune, “les partenaires, viennent de rédiger un manifeste qui sera dévoilé durant la conférence. Ce texte constitue une forme d’engagement. Il viendra guider nos actions futures au sein de nos écosystèmes respectifs. Il aura des répercussions concrètes. De notre côté, au Pool, c’est quelque chose que nous intégrons déjà au quotidien. Cela fait partie des grandes orientations de la French Tech et nous sentons aussi la volonté des entreprises du territoire d’aller dans cette direction. Parenthèse importante : l’innovation vertueuse n’est pas que technologique. Elle concerne aussi nos modes de fonctionnement, y compris en lien avec les acteurs de l’économie sociale et solidaire. À cet égard, nous travaillons avec TAg35, par exemple.”
Le paradoxe du numérique
Même état d’esprit chez b<>com. “Aujourd’hui, nous plaçons l’innovation responsable au cœur de nos travaux de recherche, indique Emmanuelle Garnaud-Gamache. Il y a 10 ans, nous ne pensions pas comme ça. Nous étions dans une course technologique presque systématique. Désormais, nous sommes sortis de cette course à la performance. Nous nous intéressons davantage à des solutions optimisées et questionnées sous l’angle de l’utilité.”
À Inria aussi, “ces préoccupations sont intégrées dans les travaux scientifiques, confirme Christine Morin. En informatique, il y a beaucoup de thématiques où l’on peut introduire ce questionnement sur l’empreinte environnementale, l’optimisation énergétique mais aussi l’impact sociétal, le respect de la vie privée, etc. Ce qui me donne l’occasion d’inviter les visiteurs de la Digital Tech à aller écouter Jacques Sainte-Marie, adjoint au directeur scientifique d’Inria, en charge des questions liées à l’environnement et au développement durable. Il viendra nous parler d’un paradoxe intéressant : le numérique présente un impact environnemental non nul, mais il permet aussi de progresser dans le domaine des sciences de l’environnement. En cela, il est à la fois le problème et la solution…”
Bpifrance apporte des greentech sur un plateau Banque publique d’investissement, partenaire de la Digital Tech, Bpifrance organise durant l’événement une rencontre entre quelques entreprises choisies et des startups proposant des solutions vertes innovantes. Objectif de cette mise en relation : accélérer la transition énergétique. BTP, industrie, agriculture, transports… La décarbonation s’invite dans tous les secteurs. Les entreprises doivent s’adapter. Bpifrance s’est positionnée pour aider ses clients à réussir cette mutation, devenant au passage ‘la banque du climat’. C’est dans le cadre de cette mission qu’elle organise pendant la Digital Tech un rendez-vous d’affaires sur mesure. “Nous invitons un certain nombre de dirigeants à qui nous disons : en une après-midi, vous allez rencontrer une dizaine de greentech qui peuvent vous apporter des solutions pour les économies d’énergie et d’eau, l’amélioration du recyclage, la RSE au sens large. Nous allons vous faire gagner beaucoup de temps parce que dans aucun autre événement vous n’auriez pu rencontrer toutes ces startups d’un seul coup,” résume Clément Quinebeche, Chargé de coordination du plan climat à la Délégation régionale de Bpifrance. En pratique, la réunion commencera par une série de présentations. “Les entreprises invitées auront d’abord une minute trente chacune pour exprimer leurs besoins spécifiques en termes de transition énergétique. Puis ce sera au tour des greentech de pitcher pour présenter leurs technologies. À la suite de quoi, les uns et les autres pourront discuter en tête-à-tête pour voir s’il y a une suite à donner. Notre intervention s’arrête là.” Si des collaborations s’engagent, Bpifrance peut ensuite éventuellement répondre aux besoins d’accompagnement et de financements des projets en tant que banque d’entreprise. “Mais il nous est arrivé aussi d’intervenir dans la phase précédente en contribuant à financer la R&D de ces greentech pour les aider à faire aboutir une solution complètement opérationnelle, précise Cécile Martin, chargée d’affaires innovation. Nous avons soutenu, par exemple, la startup rennaise Energiency qui aide les industriels à mieux évaluer leur performance énergétique.” Une partie de ses recherches sur l’intelligence artificielle a d’ailleurs été menée en collaboration avec Inria. Et qui sont les sociétés invitées à ce rendez-vous ?
Dans le contexte inflationniste global, l’événement trouve un écho particulier. “Chez les dirigeants, le changement d’attitude est très palpable, témoigne Clément Quinebeche. Ils se mettent en recherche pro-active de solutions pour faire face à la hausse des coûts d’énergie. Nous avons des dirigeants qui nous contactent pour s’assurer que nous ne les avons pas oubliés sur la liste des invitations.« |