Nouveau projet d’entreprise au Startup Studio d’Inria, Mobpti élabore une solution logicielle pour augmenter la confiance que l’on peut accorder aux algorithmes de prise de décision des véhicules autonomes. À la clé : un processus de validation plus facile pour les constructeurs.

“Les industriels qui prévoient de mettre sur le marché des véhicules à conduite autonome doivent se soumettre à des phases très importantes de vérification, validation, homologation et certification. C’est à la fois long et coûteux. Les logiciels que nous développons vont permettre d’anticiper et donc de réduire les échecs potentiels lors de ces étapes,” résume Alexis Mifsud. Porteur du projet de création d’entreprise Mobpti, l’ingénieur de recherche vient de rejoindre le Startup Studio au Centre Inria de l’Université de Rennes pour un cycle de maturation technologique qui va durer un an. Il y peaufine des algorithmes qu’il a élaborés lors de son passage au Centre Inria de l’Université de Grenoble, dans une équipe où il travaillait sur la génération de trajectoires pour les bus autonomes.
Par rapport à des logiciels embarqués, l’outil diffère sur deux points. “Je m’enlève la contrainte de devoir trouver une solution très rapidement. Ce que les constructeurs, eux, naturellement, doivent faire sur leurs véhicules. Je m’enlève aussi la contrainte d’une puissance de calcul limitée. Je peux me permettre de passer deux heures à calculer une solution sur un scénario, là où, normalement, il faut trouver une réponse dans la milliseconde.”
Identifier les meilleures solutions de conduite
Grâce à tout cela, Mobpti va permettre d’identifier les meilleures solutions de conduite pour des scénarios donnés. “Par exemple, en fonction de l’environnement traversé, on peut dire qu’à 26 km/h, le véhicule possède une marge de freinage suffisante si un obstacle se présente à telle distance. Ce qui ne serait plus le cas à 32 km/h. Voilà le type d’information que l’on est capable de produire. On peut faire cela en prenant en compte le profil de la route, plusieurs futurs possibles pour les obstacles dynamiques…”
Le service proposé pourra se composer de deux logiciels. Le premier est accessible en ligne. “Il cherche les solutions optimales, la meilleure réponse à une situation de conduite donnée. On en déduit une mesure du risque inévitable lié à ce scénario.” Le second fonctionne en local sur la machine de l’utilisateur. “Lui aussi effectue la mesure, mais cette fois-ci avec la solution du constructeur. Ensuite, nous opérons une soustraction entre les deux.”
L’information qui en résulte va permettre aux équipes de développement d’aller chercher les marges de progression sur la sécurité et la robustesse de leur application. À noter au passage que tout le processus se déroule sans devoir accéder au code source de l’industriel. Aucun risque pour sa propriété intellectuelle.
Vers une brique intégrable dans les simulateurs
À qui va s’adresser ce nouvel outil ? Aux constructeurs de véhicules autonomes ? “Oui, mais aussi aux centres de tests. Ce sont des acteurs importants de la filière. L’État leur délègue la responsabilité d’organiser la tâche d’homologation, par exemple. Pour effectuer leur métier, ils utilisent eux-mêmes des logiciels de simulation comme Carla, IPG Automotive ou AV Simulation. Notre brique pourrait même à terme s’intégrer dans certains de ces simulateurs car nous sommes complémentaires. Ces logiciels ont pour but de s’approcher le plus possible de la réalité. Ils vont aller jusqu’à simuler la raideur des ressorts dans la suspension. A l’inverse, notre outil n’a pas besoin de ce niveau de détail. En ne nous intéressant qu’à la partie de prise de décision des véhicules, de plus en plus importante et intelligente, nous pouvons simplifier le problème et apporter cette complémentarité.”
Transports en commun
Le projet ambitionne de s’adresser aux transports en commun. “C’est le mode de déplacement le plus en phase avec nos valeurs éthiques et l’intérêt général. Si, dans nos villes, tout le monde se déplace à l’aide d’un véhicule personnel à conduite totalement autonome, on fabrique une aberration écologique, sociale et économique.” Cela étant, “notre solution intéresse aussi les constructeurs automobiles car la sécurité de leurs aides à la conduite constitue pour eux une préoccupation centrale.”
La phase de maturation vient de commencer au Startup Studio d’Inria, et s’accélère avec un premier recrutement d’ingénieur. “Elle devrait nous permettre de présenter une preuve de concept dans environ un an. D’ici là, nous prévoyons de participer à l’UTAC Challenge en mai !”